
Avec la scène de la tempête apaisée, l’Évangile nous interroge sur nos capacités à affronter les situations difficiles à la suite de Jésus. Quelles sont nos faiblesses, de quelles qualités devons-nous faire preuve pour témoigner de la vie que nous apporte le Christ ? Un épisode destiné aux chrétiens des premières communautés qui devaient approfondir leur engagement de disciples de Jésus.
Après le Sermon sur la Montagne, où il a révélé la charte du Royaume, Jésus a opéré des miracles de guérison aussi bien auprès des païens que des Juifs. Il a rassemblé de grandes foules qui se sont mises à sa suite. Aujourd’hui, il s’est embarqué avec ses disciples les plus proches pour passer sur l’autre rive du lac de Génésareth et aborder les terres païennes.
La tempête – littéralement un grand séisme – qui se déchaîne sur le lac vient souligner l’importance de ce qui se joue. Traditionnellement, Dieu se manifeste dans un déferlement de phénomènes naturels et par conséquent, les disciples assistent à une théophanie. La barque dans laquelle ils se trouvent menace de chavirer. Bizarrement Jésus dort, comme s’il était étranger aux événements, aux risques que courent les siens. Il n’interviendra qu’à leur demande expresse, et encore, après leur avoir adressé des reproches pour leur manque de foi. Son comportement est de toute évidence une mise à l’épreuve des disciples.
Jésus menaça les vents et les flots à la manière d’un exorciste qui domine les forces maléfiques. Et la tempête s’apaise. La mer était considérée comme le repaire du mal et, visant ici les forces de la nature, Jésus commande en Seigneur, il manifeste sa divinité. Ce que comprennent d’ailleurs les observateurs extérieurs de la scène, qui s’interrogent sur son identité. Ces hommes qui s’émerveillent sont sur l’autre rive du lac, des non-croyants donc, qui ne parlent de Dieu que du dehors et ne le connaissent pas.
Les disciples ne font preuve d’aucun courage, au contraire ils sont effrayés par les événements qu’ils ne dominent en aucune manière. L’aide de Jésus leur est indispensable pour sortir de la situation, seuls ils ne peuvent rien. Et quand Jésus les apostrophe, il ne leur parle pas de la solidité de la barque ou de vaillance, mais uniquement de leur manque de foi. Seule la foi en lui permet de s’en sortir.
L’image de la barque malmenée dans la tempête est souvent utilisée pour représenter l’Église. Que de crises celle-ci n’a-t-elle pas traversées depuis ses débuts. Pour ne citer que les plus récentes, elle a subi les épreuves du modernisme, du relativisme, de la sécularisation, de l’indifférentisme, de la pédophilie. Qu’est-ce qui fait qu’elle n’ait pas été engloutie ? Ce n’est pas la force de ses institutions, pas plus que le courage de ses dirigeants ou la sainteté de ses fidèles. Non, en tout cela elle a pu faillir et chuter. La seule manière de dépasser tous ces bouleversements est la foi en le Christ Jésus.
De même pour chacun d’entre nous, il nous est impossible de traverser seuls les difficultés et les crises de notre vie sans la foi. Une foi qui ne soit pas simplement une adhésion intellectuelle à un dogme ou à des théologies, aussi intéressantes soient-elles. Au contraire, la foi est le fruit de la rencontre avec quelqu’un, l’expérience d’une relation avec Jésus, sur qui on peut compter, s’appuyer, en qui on peut s’abandonner. La foi est de l’ordre du lâcher-prise. C’est à partir du moment où nous nous abandonnons que nous pouvons dépasser nos peurs, nos terreurs, et voir s’apaiser les bourrasques qui nous assaillent.
Quand les barques de nos vies sont frappées par les vents contraires et les flots tumultueux, le courage n’est peut-être pas la qualité essentielle pour affronter la situation. Seule la foi, la confiance en celui qui peut nous sauver pourra apaiser nos tempêtes intérieures et nos conflits.