
Bonne Nouvelle aujourd’hui pour les tout petits qui reçoivent la révélation de la relation du Père et du Fils. Bienheureux – en avant [1]– ceux dont les yeux s’ouvrent aux merveilles de Dieu.
L’évangéliste Luc rassemble deux paroles de Jésus[2] – la révélation aux tout petits et la béatitude de ceux qui ont vu – dans une prière qu’il situe au début de la montée de Jésus à Jérusalem[3], juste après l’envoi et le retour de mission des septante-deux disciples[4].
Jésus retrouve ses disciples après le succès de leur mission. Il agit sous l’action de l’Esprit Saint, lequel intervient dans sa joie et dans sa prière au Père. Ce même Esprit qui opère l’œuvre créatrice de Dieu et l’investiture du Messie.
Le langage de Jésus est celui des apocalypses anciennes qui refusaient la connaissance des choses de Dieu aux savants, mais l’accordaient à ceux qui priaient le Seigneur avec humilité[5]. Ce qui est ici dévoilé n’est rien moins que le secret du Royaume suscité par Dieu lui-même. Et ce mystère est révélé aux tout petits, les disciples à qui Jésus s’adresse. Le Fils leur fait découvrir ses merveilleux rapports avec le Père, fait ressortir la grâce magnifique qui est accordée aux bénéficiaires de cette révélation.
Dans ce contexte, Jésus reconnaît dans l’accueil du message porté par les septante-deux disciples l’œuvre de grâce souveraine du Père. Comme dans les Béatitudes[6], il proclame la bienveillance particulière de Dieu pour les tout petits plutôt que pour les grands de ce monde. Au terme de la mission des disciples, Jésus indique le centre du message évangélique qui est révélation du Père dans le Fils.
La Béatitude « Heureux les yeux qui voient ce que vous voyez » concerne non seulement les disciples en retour de mission, mais s’étend au-delà du simple cercle des témoins de la révélation de Jésus. Elle marque la grâce faite aux fidèles bénéficiaires des promesses de l’Évangile.
L’Évangile garde toute sa saveur dans notre attente d’aujourd’hui de la venue de Jésus au cœur de la vie de notre humanité. Il nous rappelle d’abord le rôle de l’Esprit Saint dans nos existences, dans nos prières. Il nous fait découvrir la force de son œuvre créatrice en nous, la manière dont nous pouvons l’associer dans nos joies, dans nos démarches.
Il nous exhorte ensuite à l’humilité, à nous sentir concertés par les tout petits que nous côtoyons, à les prendre pour modèles. Prenons garde à ne pas nous comporter en sages ou en savants, à ne pas nous laisser entraîner dans les tentations du pouvoir. Restons attentifs à la présence de Jésus dans notre vie et à la bienveillance que Dieu nous porte. Entrons dans la relation d’amour du Père et du Fils.
Il nous signifie enfin que nous sommes les bénéficiaires des promesses de Dieu, héritiers du Royaume. La béatitude de Jésus pour ceux qui voient les merveilles qu’il accomplit nous concerne tous. Nous n’en sommes pas les témoins, comme l’ont été les septante-deux disciples. Mais nous pouvons voir ce qu’ils ont vu, parce que nous vivons de la révélation de Jésus. Heureux sommes-nous !
[1] Chouraqui traduit « Bienheureux » par « en avant ».
[2] Les récits parallèles de Matthieu sont en Mt 11,27-28 et Mt 13,16-17.
[3] Jésus prit résolument la route de Jérusalem (Lc 9,51).
[4] Lc 11,1-26.
[5] Ainsi Daniel peut-il interpréter le rêve de Nabuchodonosor (la statue aux pieds d’argile) que les sages de Babylone n’ont pu commenter parce qu’il implore le Dieu du ciel et qu’il loue Dieu de lui avoir accordé la sagesse. (Dn 2,3-13).
[6] Lc 6,20-26.