méditation pour la fête de Saint Matthieu

En cette fête de Saint Matthieu, Le Christ invite à la miséricorde. Il nous appelle à pénétrer dans l’amour infini de Dieu pour l’homme, à nous en empreindre pour sortir du péché et nous ajuster à Dieu. Derrière le terme miséricorde, transparaît le mot hébreu hésed, qui exprime l’amour de Dieu dans toutes ses dimensions, avec une note de gratuité.[1] Appliqué à l’homme, il traduit l’attachement profond du cœur que nous appelons souvent la piété, un amour qui veut imiter la fidélité de l’amour de Dieu.[2]

Le repas de Jésus avec les pécheurs se situe, dans les évangiles synoptiques,[3] dans le cadre d’une série de controverses avec les scribes et les pharisiens. Il est précédé par le bref récit de l’appel de Matthieu[4] assis à son bureau de publicain. Les évangélistes veulent ainsi expliquer le choix d’un publicain dans le groupe des Douze. Les publicains étaient des collecteurs d’impôt au service de l’occupant romain et réputés pour leur peu de scrupule dans le maniement de l’argent. Leur nom est souvent associé à celui de païen et surtout de pécheur.

Or Jésus accepte de manger à la table des publicains.[5] La scène décrite dans l’évangile pose un grave problème : Jésus enfreint la recommandation de la tradition israélite de ne pas prendre de repas avec les païens[6] ni avec les pécheurs. Car cette commensalité est considérée comme une connivence. Il faut refuser de frayer avec les pécheurs qui peuvent entraîner le mal.[7]

Vient alors la question : Pourquoi ? adressée aux disciples. Jésus répond par un proverbe imagé suivi d’une explication. Il se compare à un médecin venu soigner des malades. Ceux-ci sont les pécheurs, les bien portants représentent les justes, ou ceux qui se croient tels.[8] En Jésus se concrétise le thème de Dieu qui guérit, pour signifier son désir de pardonner.[9] La mission de Jésus est une mission de salut, et les guérisons physiques trouvent tout leur sens à cette lumière de la rédemption.[10]

Entre le proverbe et son application, Matthieu, toujours soucieux de montrer en Jésus l’accomplissement des Ecritures se réfère à la tradition prophétique[11] du primat de l’amour sur les sacrifices. L’évangéliste retourne le sens de la citation pour montrer en Jésus la figure incarnée de la miséricorde divine. Chacun de nous est alors appelé à rencontrer ses frères pour leur témoigner cette miséricorde divine qui veut ramener les pécheurs au vrai amour. Bienheureux les miséricordieux !

Je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs, dit Jésus. Ce qu’il réalise pour Matthieu, c’est le plan de salut qu’il offre à chacun de nous. A l’égal du publicain, nous sommes appelés à mettre nos pas dans les siens. Pour marcher vers la table où il nous attend. La table de sa Parole et de son Pain, mais aussi tous les lieux ou les occasions où, par gestes ou en paroles, s’expriment des communions : un don, un échange, un partage. Puisse Dieu fortifier notre désir de suivre Jésus !   


[1] Comme dans le refrain qui scande le psaume 135 (136) : Car éternel est son amour.

[2] N’y a-t-il plus un homme de la maison de Saül, que j’accomplisse pour lui un acte de cette fidélité que Dieu sanctionne ? (2 S 9,3).

[3] Voir les versions parallèles de Marc (2,1-12) et de Luc (5,33-39.

[4] Matthieu est nommé Lévi, fils d’Alphée par Marc et Lévi par Luc. Il apparaît dans les listes d’apôtres, mais on ne sait rien de sa vie. Depuis l’antiquité, des doutes se sont élevés sur son identification à Lévi et également sur l’identification à Matthieu de son évangile éponyme.

[5] Ce qui lui est reproché par les autorités religieuses : Et les Pharisiens et les scribes murmuraient ; ils disaient : « Cet homme-là fait bon accueil aux pécheurs et mange avec eux ! » (Lc 15,2).

[6] Lui (Joseph, fils du patriarche Jacob), on le servit à part, et eux de leur côté. Les Egyptiens mangeaient avec lui, à part, car les Egyptiens n’ont pas le droit de manger avec les Hébreux. Ce serait pour eux une abomination (Gn 43,32).

[7] Mon fils, si des mauvais garçons veulent t’entraîner, n’accepte pas ! (Pr 1,10).

[8] Comme certains qui étaient convaincus d’être justes et qui méprisaient les autres (Lc 18,9) dans la parabole du Pharisien et du collecteur d’impôt.

[9] Le thème du Dieu qui veut guérir Israël (Os 7,1) est présent dans l’Ancien Testament : Je le guérirai, je le guiderai, je lui prodiguerai réconfort, à lui et à ses endeuillés (Is 57,18).

[10] Les récits des paralysés de Capharnaüm (Mt 9,1-8) et de Bethesda (Jn 5,1-18) sont explicites à cet égard.

[11] Car c’est l’amour que je désire, et non les sacrifices, la connaissance de Dieu, plutôt que les holocaustes (Os 6,6).

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