
Merci à Alexis de nous partager cette méditation, bien nourrissante.
La démarche de prière pour l’unité des chrétiens qui nous est proposée cette semaine n’a rien d’anodin. Prier en vérité invite à une transformation radicale de la personne dans un ajustement à Dieu et aux autres. Etablir ou restaurer des relations harmonieuses et équilibrées dans le respect des différences sans chercher à les nier ou les effacer. L’unité ne se construit que dans la reconnaissance des singularités sans jamais rechercher l’uniformité.[1] Prier pour l’unité suppose de sortir de sa manière habituelle de vivre sa religion, se mettre en route, écouter ensemble la parole de Dieu, adorer le Seigneur, vivre l’échange des dons, prendre un chemin différent après une rencontre authentique du Christ.
L’unité des chrétiens, c’est le travail des différentes Eglises pour se rapprocher et réaliser la prière de Jésus : Que tous soient un comme toi, Père, tu es en moi et que je suis en toi, qu’ils soient un en nous eux aussi, afin que le monde croie que tu m’as envoyé.[2] L’unité des croyants dans la communion d’amour du Père et du Fils est signe de la réalisation du Royaume et de l’authenticité de la mission de Jésus.
Les obstacles à l’unité sont causés par l’égoïsme, les dissensions, l’individualisme de l’humanité, et aussi son indifférence face à Dieu. Si Dieu a créé le monde et placé l’être humain au centre de sa création, ce n’est pas pour que règne la division, mais pour que nous soyons toujours unis en lui. Lorsque nous travaillons à cette unité, en la faisant réalité dans nos familles, nos groupes, nos communautés, nous anticipons la vie éternelle, la plénitude de la vie en Dieu et faisons progresser son règne.
Mais si Jésus prie pour cette unité, cela montre bien que ce n’est pas chose facile, mais que cela vaut la peine. N’a-t-il pas dû, lui aussi, reprendre à plusieurs fois ses apôtres qui se disputaient la meilleure place[3] et faisaient peu de compréhension envers les autres[4] ? Ce n’est que peu à peu qu’il leur a enseigné et communiqué comment vivre cette unité, signe visible de sa présence aux hommes. La quête de l’unité entre nos Eglises est une œuvre de longue haleine, avec des avancées et des échecs, qui demande de dépasser les blessures et les frustrations de l’histoire. L’unité ne peut se forger qu’à force de patience, de prière, de pardon, d’humilité, de docilité, de confiance.
Tout passe par le Christ. C’est seulement en lui et par lui que nous sommes unis et que nous recevons l’amour du Père. Nous avons besoin de l’écouter et de le recevoir pour mieux comprendre cette unité à laquelle il nous appelle avec lui et entre nous. Même si nous œuvrons pour l’unité, elle reste un don d’amour gratuit qui nous est communiqué dans la grâce de l’Esprit Saint.
L’unité à laquelle nous convoque le Christ se destine à être vécue dans l’aujourd’hui de sa parole. C’est aujourd’hui que s’accomplit cette parole, nous dit-il.[5] Un aujourd’hui qui est le sien, sans nostalgie du passé, ni appréhension de l’avenir. Un aujourd’hui qui est le nôtre, qui transcende le temps. Jésus nous engage à travailler aujourd’hui à l’avènement de son Royaume. Par des œuvres de justice, de partage, de paix, de solidarité, de réconciliation. Alors nous contribuerons à construire l’unité entre nous.
[1] A Babel, Dieu a dispersé les hommes qui recherchaient l’uniformité (Gn 11,1-9).
[2] Prière sacerdotale de Jésus (Jn 17,21).
[3] Comme Jacques et Jean voulant siéger avec Jésus dans la gloire (Mc 10,37) ou la querelle des disciples pour savoir qui était le plus grand (Lc 22,24).
[4] Par exemple par rapport aux enfants que les disciples veulent écarter de Jésus (Mc 10,13), ou encore avec la Cananéenne qu’ils veulent renvoyer (Mt 15,23).
[5] Dans la synagogue de Nazareth, après avoir lu la prophétie d’Isaïe (Is 58,6) sur la Bonne Nouvelle aux pauvres (Lc 4,21).