
La Transfiguration[1] de Jésus annonce sa Résurrection. Aujourd’hui, le Christ manifeste sa gloire. Il nous invite à vivre avec lui l’expérience fondatrice d’un chemin de libération. Il nous associe à son mystère de mort et de vie pour, qu’à notre tour, nous puissions refléter sa gloire auprès de nos sœurs et frères.
La gloire est bien plus que les honneurs, elle représente la densité de présence d’une personne, le poids qu’on lui accorde. La gloire de Jésus signifie l’influence qui est manifestée dans l’existence du croyant.
Une théophanie qui se perçoit par la vue dans le changement de visage et l’éclat du vêtement, mais aussi par l’ouïe dans la voix venue de la nuée. Toutes manifestations sensorielles qui troublent ceux qui en sont l’objet. Jésus est le Fils, l’élu de Dieu, il est la Parole, le prophète que tout le peuple doit écouter.
Si les sens sont mis à contribution pour percevoir sa gloire, il faut surtout souligner que c’est parce que Jésus prie qu’il est revêtu de gloire. Ce rôle de la prière traverse tout l’évangile de Luc.[2] La prière est le lieu privilégié de rencontre avec le Père. Et la manifestation de Dieu est une réponse à cette prière.
Un rapport entre gloire et prière qui est également vrai pour tout croyant. C’est parce que l’on prie que l’on peut vivre de la gloire de Dieu, communier à son amour et goûter la densité de sa présence.
Pierre, Jean et Jacques accompagnent Jésus sur la montagne, lieu de la rencontre de Dieu. Ces trois piliers de l’Eglise sont particulièrement associés à l’action et au mystère de Jésus.[3] S’ils sont les témoins privilégiés de sa manifestation de gloire, leur attitude reflète leur crainte et leur incompréhension. Ainsi Pierre évalue mal la situation et rêve de la prolonger. Il ne comprend pas l’instantanéité du moment qui le saisit au sortir d’un sommeil mystérieux.[4]
La peur qui saisit les trois disciples est celle de tous ceux qui se confrontent à Dieu, à l’intensité de sa présence. La frayeur, l’émoi ou l’épouvante accompagnent toujours les manifestations du mystère divin.[5] Effroi de l’homme devant ce qui dépasse son entendement, dont il perçoit la transcendance. Mystère de gloire et de résurrection.
Par le témoignage de Moïse et d’Elie, c’est tout l’Ancien Testament, avec la Loi et les Prophètes, qui est convoqué à s’associer à la gloire de Jésus. Avec le Christ s’accomplissent les promesses de Dieu au peuple d’Israël. Ils s’entretiennent avec lui de son départ, ou plus exactement, selon le terme utilisé, de son Exode vers Jérusalem.[6] Jésus vient libérer l’humanité de la servitude du péché et de la mort.
La montée à Jérusalem signifie bien plus qu’un simple chemin. Jésus inaugure une expérience décisive et fondatrice, pareille à celle d’Israël au désert. Avec une libération, mais d’abord une épreuve, la croix. Une voie de vérité et de liberté qui s’ouvre pour nous, peuple de l’Alliance renouvelée dans son sang.
De l’ensemble de la scène émane une impression de secret. Ainsi, la révélation est réservée à un nombre restreint de croyants, mais surtout leur mutisme après l’événement questionne. Le secret gardé souligne le mystère de l’expérience mystique ineffable qu’ils ont vécue, l’intimité de Dieu qu’ils ont pénétrée, qui ne peut être évoquée et interprétée qu’avec pudeur et humilité.
La Transfiguration révèle l’intimité et la tendresse de Dieu, présence qui pénètre les cœurs. Alliance de foi qui ne ment pas sur la mort, inévitable passage vers la vie. Ils sont beaux, les visages transfigurés par la foi, habités de la présence de Dieu et s’appuyant sur la confiance de son amour. Laissons-nous transparaître notre espérance par des visages de résurrection ?
[1] L’épisode de la transfiguration est relaté dans les trois évangiles synoptiques. Luc cependant, à l’inverse de Matthieu et Marc, n’en évoque pas le terme. Le mot grec, metamorphosis, a en effet une résonance trop païenne aux oreilles de ses lecteurs.
[2] L’évangéliste ne manque jamais de noter comment, à de multiples occasions de sa vie et de son ministère, Jésus se retire pour prier son Père.
[3] Pierre, Jacques ou Jean sont souvent associés à des moments clés du ministère de Jésus. Ainsi, ils sont les premiers appelés, ils l’accompagnent lors de la guérison de la fille de Jaïre, ils sont nommés au moment du départ décisif vers Jérusalem, Ils sont désignés pour préparer la dernière Pâque.
[4] Ce genre de sommeil saisit souvent les voyants qui sont confrontés à la présence de la transcendance de Dieu, pour ne pas le voir face à face.
[5] L’évangile de Luc en donne plusieurs exemples, lorsque Jésus apaise la tempête sur le lac, lors de la pêche miraculeuse, la réaction de Marie-Madeleine et des femmes devant le tombeau vide, ou celle de Onze devant l’apparition du Ressuscité au soir de Pâques.
[6] La montée de Jésus à Jérusalem est ainsi comparée à l’Exode du peuple juif, à sa marche au désert, qui le mène à sa libération.
Bonjour Mr le curé,
Simplement pour vous féliciter et vous remercier pour votre message du mois de mars qui redonne un triple sens au carême et cette formule formidable « car aime ».
Bonne journée
Jacques
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