
Merci à Alexis de sa méditation dominicale, et nous en aurons une pour l’assomption.
Vivante en effet est la Parole de Dieu, énergique et plus tranchante qu’aucun glaive à double tranchant.[1] Le langage de Jésus se fait aujourd’hui brûlant, il vient trancher dans le vif de nos vies. Celui dont nous attendons la paix dans le monde annonce semer la division, porter le feu qui vient embraser la terre.
Ce feu que Jésus appelle de tout son désir est cette flamme au milieu de laquelle le Seigneur appela Moïse dans le buisson qui ne se consumait pas pour lui dire qu’il avait vu la misère de mon peuple en Egypte.[2] Aussi le feu du jugement de Dieu promis par Isaïe qui vient pour régler sa dette de colère par la fureur.[3] Encore ce feu dévorant prisonnier du corps de Jérémie qui le pousse à dénoncer les trahisons et les injustices.[4] Enfin ces langues de feu se posant sur chacun des disciples à la Pentecôte pour les remplir d’Esprit saint et les envoyer annoncer la Bonne Nouvelle en toutes les langues.[5] Le feu libère, il purifie et détruit, il dénonce, il donne l’Esprit, tout à la fois.
Le feu de l’Esprit est celui de l’amour de Dieu. Jésus est venu témoigner cet amour, et il brûlait d’un grand désir d’en embraser le monde entier. Il a confié à son Eglise la mission de propager le brasier de cet amour. Laisserons-nous prendre en nous le feu ?
Brûler fait craquer le bois sec de nos limites, de nos préjugés, de nos entêtements. Et ce feu vient se heurter à toutes les résistances que nous lui opposons. A nos divisions, nos clivages, nos disputes, nos ruptures. Ces pardons que nous refusons, cette solidarité que nous dénions. Et aussi ces tiédeurs qui paralysent, ces douleurs qui crucifient.
Et puis, témoigner, c’est risquer. Risquer l’incompréhension, le rejet, la persécution. Proclamer la mort sur la croix d’un Messie humilié, célébrer sa résurrection et vivre dans l’attente active de sa venue, comment un tel témoignage, insensé aux yeux de nos contemporains, pourrait-il ne pas rencontrer d’opposition ? Ou comment dénoncer tout ce qui opprime l’homme irait-il de soi dans un monde où dominent l’indifférence, l’égoïsme, la cupidité et l’appétit de puissance ? Ou encore, annoncer la paix est-il crédible quand se distillent la haine, la guerre, la violence et la terreur ?
Rechercher la paix qui vient de Dieu, tenter de la recueillir jaillissant d’un pardon donné à la mesure du cœur de Dieu, cela n’a rien à voir avec la recherche d’un bonheur facile et sans nuages. Le Christ lui-même dans son engagement pour le bonheur de l’homme a été acculé à combattre le mal dans sa forme la plus extrême et cela l’a mené jusqu’à plonger dans les eaux de la mort. Mais de ce baptême, il rejaillit vivant du tombeau.
Ouvrir un chemin de paix et le recevoir de Dieu, n’est-ce pas changer notre regard sur notre vie et celle des autres ? Le connaître, lui, avec la puissance de la résurrection au travers même des divisions et des obstacles au sein de nos existences. Il nous a devancés et à sa suite, d’innombrables témoins ont résisté et ont vaincu la mort avec lui. N’ayons pas peur de vivre au monde.
[1] L’entrée par la foi dans le repos de Dieu (He 4,12).
[2] Le buisson ardent (Ex 3,2.3-7).
[3] Tous les hommes jugés par Dieu (Is 66,15-16).
[4] Ce que Jérémie reproche à Dieu (Jr 20,9).
[5] La venue du saint Esprit (Ac 2,3-4).