
Quand il prédit la ruine du Temple et qu’il décrit les signes proches et lointains du jugement, Jésus va bien au-delà d’un simple effet d’annonce d’événements dramatique. Il prophétise la tribulation de la fin des temps et son retour en gloire dans le style des apocalypses, mais surtout il exhorte à l’espérance et à la vigilance. Un encouragement qui garde encore tout son sens pour nous aujourd’hui.
Le Christ est arrivé au terme d’un périple qui l’a fait monter de Galilée à Jérusalem où il vivra sa Passion et sa Résurrection. Il adresse ici un ultime discours au peuple rassemblé autour de lui au Mont des Oliviers.
L’annonce que fait Jésus de la ruine du Temple est source de scandale pour ses auditeurs. Le Temple, centre de la vie religieuse, avait en effet été rebâti quelques années auparavant[1] et semblait défier les siècles. Il sera pourtant détruit un peu plus tard par les Romains.[2] Jésus n’était pas le premier à prédire pareille destruction, le premier Temple en avait déjà été l’objet.[3] Les prophètes voulaient ainsi indiquer que le Seigneur dénonçait son Alliance avec son peuple. Jésus vient signifier qu’Israël a refusé en lui l’envoyé de Dieu.
L’annonce de Jésus suscite des questions sur les circonstances temporelles et les signes accompagnant l’événement. Dans sa réponse, il porte l’attention sur la fin des temps et l’avènement du Fils de l’Homme. Il met en garde contre les faux messies qui s’attribueront son rôle et son autorité et, en maîtres d’erreur, annonceront l’imminence de la fin. Autrement dit, il appelle à faire la différence entre ce qui relève proprement de la fin des temps et de ce qui appartient à l’histoire de l’humanité.[4] Il en conclut par un appel à la vigilance dans le discernement des signes.
Sous des dehors et dans un style propres à susciter l’effroi, l’évangile, parce qu’il annonce le retour du Christ et l’avènement du Royaume, garde toute sa pertinence et son actualité et reste Bonne Nouvelle pour nous encore aujourd’hui. Il engage d’abord à ne pas craindre les événements parfois dramatiques – guerres, soulèvements, épidémies – qui surgissent dans l’histoire de l’humanité. Ces signes sont de tous les temps, des crises ont traversé toutes les époques et toutes les sociétés. Ils ne sont que des péripéties et ne signifient pas la fin du monde. Nos regards doivent donc se porter ailleurs et plus loin.
La Parole de Dieu nous incite ensuite à ne pas se laisser distraire par ces bouleversements qui peuvent survenir. Ni non plus par tous les prophètes de malheur qui ne manquent pas de pulluler à ces occasions. Ils exploitent la crédulité des naïfs et surfent sur les catastrophes et les fausses informations. Ils attisent l’égoïsme, la fatalité et le complotisme pour mieux asseoir leur pouvoir, semer le désordre et détisser les liens de solidarité entre les êtres humains.
Le Christ exhorte encore à apprendre à distinguer les signes des temps qui annoncent sa venue. Ce qui signifie être attentifs à sa présence dans notre monde et dans nos vies. Il nous a promis d’être avec nous tous les jours jusqu’à la fin des temps.[5] Il est déjà là, il vient tous les jours dans notre existence, nous pouvons le rencontrer dans les plus petits et les plus pauvres de nos sœurs et frères.
Jésus nous appelle enfin à ne pas être passifs, mais au contraire, par nos actions, à préparer sa venue. Le Royaume advient et il a besoin de nous pour se construire, nous devons travailler joyeusement à sa réalisation.
Avec Jésus, l’histoire des êtres humains prend consistance, elle cesse d’être pure dispersion et multiplicité. Il lui donne cohérence et l’ordonne au dessein de Dieu, à sa création. Il nous engage à distinguer la présence du Dieu créateur à l’œuvre aujourd’hui dans notre humanité.
[1] Sous Hérode le Grand en 19 ACN.
[2] Après la révolte des Juifs au premier siècle de notre ère.
[3] Par les prophètes Michée, Jérémie et Ezéchiel.
[4] L’évangile fait peut-être ici allusion aux troubles civils et militaires entourant la mort de l’empereur Néron.
[5] Mt 28,20.