méditation de ce 12 01

Aujourd’hui, Jésus manifeste son autorité à la synagogue de Capharnaüm.[1] Marc situe l’épisode au début de la vie publique. Après son baptême et les tentations au désert, Jésus débute sa mission en Galilée en y proclamant l’évangile du Royaume. De même, le long de la mer de Galilée, il appelle ses quatre premiers disciples.[2]

L’accent est mis d’emblée par l’évangéliste sur l’autorité de la parole de Jésus. Cette autorité s’exerce à la fois par son enseignement et par ses exorcismes. Son enseignement d’abord, qui traditionnellement se déroule à la synagogue, le jour du shabbat. Jésus enseigne avec autorité, car il ne procède pas à la manière des scribes, pourtant interprètes attitrés de la Loi. Ces derniers se retranchent derrière l’autorité des Écritures, tandis que Jésus innove en enseignant de sa propre autorité, qu’il tient de Dieu.

Par ses exorcismes[3] ensuite, Jésus montre l’autorité et la puissance qu’il a reçue de son Père. L’expulsion d’un esprit impur – une expression fréquente pour désigner un démon – signifie que l’influence de cet esprit impur sur la personne s’oppose à la sainteté de Dieu et de son peuple. En l’occurrence, le démon s’oppose à la sainteté de Jésus.

Le cri de l’homme possédé – Quoi de toi à moi ? – est une expression idiomatique utilisée dans la Bible pour repousser une intervention jugée inopportune ou manifester le refus de toute relation avec quelqu’un. L’esprit impur parlant par la bouche de l’homme comprend en fait que son pouvoir sur lui touche à sa fin. D’où l’ironie de la situation puisque, paradoxalement, le démon annonce l’avènement du règne de Dieu, et le triomphe du bien sur le mal.

L’esprit impur reconnaît en Jésus le Saint de Dieu. Or seul Dieu est saint, et sa sainteté s’attache à ce qui lui appartient ou qui lui est consacré. Jésus, étant le Christ consacré, est ainsi le saint par excellence. De cela le démon, parce qu’il appartient au monde des esprits, a naturellement connaissance, alors que la sainteté de Jésus ne sera pleinement manifestée aux hommes que par sa Pâque.

On peut dès lors comprendre le saisissement et le questionnement des participants à la scène. Ils n’ont pas toutes les clés de compréhension, puisque la puissance et l’autorité que manifestent Jésus sont des attributs divins. D’où également la mention de la renommée de Jésus, qui s’étend à toute la région.

Les préoccupations quotidiennes de notre monde pétri de rationalité paraissent bien étrangères au récit de l’évangile. D’autant plus que nos contemporains éprouvent souvent un important malaise face aux actes – exorcismes, guérisons, miracles – qui manifestent la puissance de Jésus dans lés évangiles, et dont ils recherchent des explications naturelles ou psychosomatiques, quand ils ne les rejettent pas. Ces actions constituent cependant une part importante du ministère de Jésus, et les écarter appauvrirait fort la portée et le retentissement de ce qu’il réalise encore aujourd’hui pour l’humanité.

Nous pouvons nous poser la question de l’autorité de la parole de Jésus, autrement dit de son Évangile, dans notre vie. Ce qu’il nous enseigne encore maintenant. Quelle place, quelle importance lui accordons-nous dans notre existence ? En quoi sa Parole est-elle pour nous règle de vie ? Comment conformons-nous nos agissements, nos engagements à l’enseignement du Christ ? Comment l’Évangile nous aide à progresser dans notre quotidien le plus concret.

Allant plus loin dans la démarche, nous pouvons alors nous demander ce qui en nous s’oppose à Dieu, à son chemin de sainteté. Autrement dit, d’examiner avec lucidité la part d’impur, de noirceur, qui est en nous et nous empêche d’accéder à Dieu. Ou encore de ces démons intérieurs qui nous emprisonnent et étouffent nos existences – l’orgueil, les appétits de puissance ou de possession, la haine, l’angoisse, la peur, l’intolérance, l’injustice, etc. – Efforçons-nous de les reconnaître et osons les nommer, pour en être libérés.[4] La parole est première[5] et libératrice. La Parole de Dieu peut, si nous le désirons, nous libérer de tout ce qui nous oppresse. Ainsi est la puissance de l’autorité du Christ. Et telle est la Bonne Nouvelle pour nous aujourd’hui.


[1] La ville de Capharnaüm, plus précisément la maison de la belle-mère de Pierre (Mc 1,29), sera le centre d’où Jésus fera rayonner son enseignement dans toute la Galilée.

[2] Jésus appelle chaque fois deux frères, d’abord André et Simon, ensuite les fils de Zébédée, Jacques et Jean.

[3] Le verbe grec exorkizein – exorciser, chasser un esprit mauvais – signifie au départ faire prêter serment.

[4] Souvent, dans les exorcismes, le fait de nommer le démon suffit à le démasquer pour en être libéré. De même, en psychothérapie, la guérison peut survenir au terme d’un processus qui vise à identifier le problème par son nom. La psychanalyse, Lacan par exemple, met en évidence le pouvoir de la parole. La médecine moderne ne pratique-t-elle pas parfois l’exorcisme en nommant la maladie pour la faire reculer ? Pour vaincre le mal, il faut le reconnaître par son nom.

[5] Au commencement était le Verbe (Jn 1,1).

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