méditation de la chandeleur

La Chandeleur est la fête de la lumière. Mais elle célèbre d’abord la Présentation du Seigneur au Temple. Et également celle de la Purification de la Vierge Marie, ses relevailles. La date en est traditionnellement fixée au 2 février, soit quarante jours après Noël. La fête clôture les manifestations de la Nativité.

La Chandeleur est la fête des chandelles,[1] qui a donné lieu très tôt d’une procession aux flambeaux.[2] Les chandelles bénies sonr supposées éloigner le mal et rappellent que le Christ est la lumière du monde. La fête a supplanté une série de fêtes romaines ou païennes qui se déroulaient toutes en février[3] et qui avaient un sens de purification, tant de la terre que des êtres humains dans l’espoir de la fin de l’hiver.

Ainsi les Romains célébraient-ils les lupercales le 14 février pour la fécondité des troupeaux. De même les Celtes fêtaient le 1er février l’Imbole, rite en l’honneur de la déesse Brigit[4] pour célébrer la purification et la fertilité au sortir de l’Hiver. Chez les peuples germaniques et scandinaves, célébrait-on à la même époque le culte de l’ours[5], au moment où ce plantigrade[6] sort de sa tanière en fin d’hiver.

La tradition des crêpes de la Chandeleur est très ancienne. Les lupercales, puis la fête de la Présentation du Seigneur au Temple étaient l’occasion de déplacements de foules importantes à Rome et les crêpes, faites avec les réserves de farine, étaient destinées à sustenter les pèlerins. C’était aussi l’époque à laquelle commençaient les semailles d’hiver et on se servait de la farine de l’année précédente pour confectionner les crêpes en symbole de prospérité pour l’année à venir. Leur forme ronde et leur couleur dorée rappelaient par ailleurs le soleil enfin de retour et la mort de l’hiver à l’époque de l’année où les jours s’allongent de plus en plus vite.

La présentation de Jésus au Temple intervient dans l’évangile de l’enfance de Luc après la naissance à Bethléem, la visite des bergers et la circoncision de l’enfant. Pareille présentation n’est nullement requise par la Loi. Ce qui est par contre prescrit est la purification de la mère et le rachat du premier-né. Ce qui explique le sacrifice offert par les parents de jésus. Les prophéties de Siméon sur Jésus correspondent à celle de Zacharie sur son fils Jean-Baptiste. Comme l’atteste la présence sur lui de l’Esprit-Saint, le vieillard est prophète, avec mission de saluer l’avènement du Sauveur –  le Christ du Seigneur – et de dévoiler à ses parents quelques traits de sa mission. De même la prophétesse Anne, dont la vie entière avait été consacrée au service de Dieu, annonce-t-elle le salut apporté par Jésus au peuple de Dieu.

Ainsi donc, Siméon prophétise le salut de Dieu apporté aux païens. C’est la première annonce du salut des nations dans l’œuvre de Luc. Il ne sera clairement proclamé qu’à partir de la révélation pascale. Jésus est l’auteur de ce salut, il est la lumière des nations : Car mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples, lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël.[7] Ou plutôt la lumière qui apporte la révélation[8] au sens fort à tous les peuples. L’universalité du salut apparaît ainsi clairement. La prophétie rappelle certaines autres du second Isaïe[9] où Dieu révèle au prophète, ou encore à son serviteur. [10] Jésus est ainsi identifié au serviteur, il est celui qui vient accomplir les prophéties d’Isaïe.

Jésus est cette lumière qui apporte l’espérance à ceux qui tâtonnent dans les ténèbres : Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande lumière. Sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre, une lumière à resplendi.[11] L’opposition entre lumière et ténèbres introduit une dimension supplémentaire. On expérimente en effet tous les matins, particulièrement dans la période où les jours s’allongent, que la lumière, avec l’apparition du soleil, vient dissiper les ombres de la nuit. L’image du lever du soleil est assimilée, dans la mentalité du temps où le texte est rédigé, à l’avènement du roi.[12] Si la lumière représente le salut, les ténèbres sont par contre synonymes de malheur, d’oppression, de mort. La symbolique évoque alors l’apparition de la gloire de Dieu, comparée au lever du soleil[13]. Jésus apparaît ainsi dans la gloire de Dieu pour vaincre les ténèbres de la mort et du péché.

Cette lumière qui émane de Dieu est grâce et bénédiction pour son peuple et rédemption pour tous : Qu’Elohim nous fasse grâce et qu’il nous bénisse, qu’il fasse briller sa face avec nous – pour connaître ton chemin sur la terre et parmi toutes les nations ton salut.[14] Jésus nous reflète le visage de son Père et enseigne la manière dont il se conduit avec nous.

Quelle est cette lumière ? Le terme hébreu lumière qui la désigne dérive d’un verbe[15] qui signifie éclairer, briller, luire, s’éclaircir, faire lumière sur, avec une nuance de bonheur dans ce que cette action apporte. La lumière, et particulièrement celle du Christ, est donc bonheur, sérénité, cet apaisement que donne l’éclat du soleil au matin.

Mais le mot signifie encore feu, flamme. On pense alors au feu du fondeur de la prophétie de Malachie[16], qui purifie. L’image métallurgique empruntée à la flottation des métaux, qui permet de les affiner des inclusions d’impuretés, est claire. Elle s’applique pleinement à Jésus, qui vient étendre l’alliance à tout l’univers et purifier l’humanité entière de toute souillure.

Enfin, le même mot hébreu désigne aussi, curieusement l’herbe dans un sens générique, peut-être les légumes verts qui fleurissent dans le jardin de la vie. On peut penser à la nourriture, et Jésus serait alors, ou son enseignement, comme une nourriture spirituelle. Mais ce sont généralement des termes plus spécifiques qui, dans la Bible, désignent la nourriture végétale.

On peut aussi songer à la fragilité de l’herbe, qui se dessèche et s’étiole. Et à la comparaison du second Isaïe[17] avec le peuple, qui peut se flétrir comme l’herbe. Et conclure que le soleil, s’il est trop puissant, peut épuiser l’herbe qui va alors faner.

On peut plus sûrement considérer la force de l’herbe de pousser et de subsister partout, même dans les endroits les plus arides, au désert. Ce sont alors ses qualités de croissance et de fructification qui viennent enrichir l’idée de lumière. La lumière permet ainsi aux nations de grandir. Jésus, qui apporte cette lumière, rend possible cette fécondité qui est une forme de sagesse. Le psalmiste le rappelle : L’ouverture de ta Parole fait lumière et rend sage les simples. [18]Le Christ est cette lucarne (encore un mot dérivé de lumière) qui ouvre l’accès à la sagesse, à la croissance. Il fait la lumière sur nos existences pour qu’elles portent du fruit.

En cette fête de la Présentation du Seigneur au Temple, laissons-nous pénétrer de la lumière du Christ. Qu’elle nous apporte bonheur et apaisement en nous débarrassant de nos scories. Qu’elle nous ouvre à la sagesse et nous fasse grandir dans l’amour de Dieu.


[1] Du latin candelarum, qui a donné en picard, par exemple, candeille.

[2] Inaugurée par le pape Gélase I en 473.

[3] Le mois de février provient du verbe februari qui signifie purifier.

[4] L’Eglise catholique célèbre sainte Brigitte le 1er février.

[5] L’ours est aussi l’animal carnavalesque par excellence, et le mois de février est celui du début des carnavals.

[6] Saint Blaise, dont l’étymologie du nom fait penser à Ours, et qui est associé à une bénédiction de la gorge avec des chandelles allumées, est aussi célébré le 3 février.

[7] Lc 2,30-32.

[8] C’est le mot grec qui a donné apocalypse.

[9] Deux annonces du second Isaïe : C’est moi le SEIGNEUR, je t’ai appelé selon la justice, je t’ai tenu par la main, je t’ai tenu en réserve et je t’ai destiné à être l’alliance du peuple, à être la lumière des nations (Is 42,6). De même : Je t’ai destiné à être la lumière des nations afin que mon salut soit présent jusqu’à l’extrémité de la terre (Is 49,6).

[10] L’identité du serviteur n’est jamais clairement déterminée.

[11] Prophétie du premier Isaïe dans Is 9,1.

[12] On peut penser au pharaon en Egypte, assimilé au dieu-soleil, ou encore à l’ascension du roi David en Israël.

[13] On n’est pas loin de la signification de nos crêpes de la chandeleur.

[14] Ps 67,2-3 : Du chef de chœur, avec instruments à corde. Psaume. Chant.

[15] Aleph-Vav-Resh, prononcez aor et dans certains cas a e. Psaume. Chant.

[15] Aleph-Vav-Resh, prononcez aor...

[16] Première lecture de la fête.

[17] Le peuple c’est de l’herbe. L’herbe sèche, la fleur se fane, mais la Parole de Dieu subsistera toujours (Is 40,7).

[18] Ps 119,130 : psaume alphabétique, lettre Phé.

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