
Capharnaüm peut se traduire par «village de la consolation». Le nom est approprié pour caractériser ce qu’y opère Jésus. Il s’est établi là avec ses disciples après l’arrestation de Jean-Baptiste. Et il rayonne à partir de là dans toute la Galilée pour apporter la Bonne Nouvelle de la consolation, du pardon de Dieu à une humanité blessée. Il enseigne avec l’autorité que lui confère son Père et chasse les esprits impurs.
La renommée de Jésus s’est répandue dans toute la région, il attire les foules au point d’engorger la maison où les frères André et Simon l’ont accueilli. Sa compassion pour ceux qui s’adressent à lui le pousse à accomplir de nombreuses guérisons et exorcismes[1]. L’évangile nous place ainsi aujourd’hui au cœur de l’action du Christ. Comment il enseigne, comment il apporte réconfort à ceux qui l’abordent.
Les séances de guérisons occupent une partie essentielle de sa mission. Jésus prend le temps d’accueillir les personnes, seules ou en groupes. Il les écoute, les aide, les console, leur montre toute la compassion, tout le respect qu’il a pour elles. Il ne les réduit pas à leur maladie ou à leur possession, mais les invite à aller au-delà de leur souffrance. Pour leur rendre leur dignité, les relever, les libérer du poids de leur mal ou de leurs fautes. Il les renvoie vers la vie.
Ainsi en est-il de la belle-mère de Simon, qu’il remet debout en lui saisissant la main. Ce contact physique dit tout le tact et toute la tendresse de Jésus pour la malade. Il se rend proche d’elle pour lui manifester avec délicatesse sa grâce de guérison. Il la fit se lever. Le terme utilisé est le même qui viendra signifier la résurrection de Jésus. La grâce qui opère en elle est ainsi grâce de résurrection, et sa guérison est à la fois physique et spirituelle. Il ouvre la femme à une vie nouvelle, promesse de Pâques.
Aussitôt remise sur pied, la femme les servait. Beaucoup plus qu’un simple service domestique, le terme désigne un ministère communautaire et liturgique. Jésus remet les êtres humains debout pour qu’ils se mettent au service de leurs sœurs et frères. S’il redonne la santé du corps et de l’esprit, c’est pour faire circuler la vie et semer l’espérance. Si Jésus guérit, c’est pour sauver de tout mal. S’ils sont multitude ceux qui veulent être guéris, ils sont moins nombreux ceux qui désirent se lever à une vie nouvelle pour entreprendre de l’inédit, donner un sens à leur existence, faire que leur pleine santé serve.
Le lendemain, déconcertant, Jésus se retire au désert pour prier. Le désert est l’endroit privilégié de la rencontre avec soi-même et avec Dieu, il est le lieu où se libère la parole[2]. Jésus, même s’il est homme de relations qui va au-devant de grands groupes, est un être d’une profonde Intériorité. Sa motivation est dans sa relation personnelle et particulière à son Père. Dans la prière solitaire, ce cœur à cœur avec lui, il trouve les ressources pour affronter les épreuves de l’existence et la force d’aborder ceux qui le pressent et le harcèlent. Son énergie puise à la source de cette intimité filiale.
Jésus ne se cantonne pas à Capharnaüm. Allons ailleurs, dit-il à ses disciples. Autrement dit, sortons de nos zones de confort pour porter l’espérance de l’Evangile à l’extérieur de nos Eglises. Au risque de nous confronter au choc d’autres cultures, d’être rejetés. La vie est au dehors et pas dans des cercles repliés sur eux-mêmes. Faisons émerger des communautés renouvelées par le souffle de la Parole. C’est pour cela que je suis sorti, nous dit Jésus.
[1] Dans l’esprit de l’époque, la maladie a toujours part liée au mal ou à la possession.
[2] Le mot «désert» en hébreu dérive du participe présent du verbe «parler». Le «parlant», celui qui parle, s’éveille à sa propre parole.