Méditation pour la messe de la fête à Villetttes

Aujourd’hui, il y a messe pour la fête à Villettes. Alexis nous propose sa méditation pour la messe de la fête.

En faisant mémoire de nos défunts,[1] nous voulons les associer à nos occupations et célébrer l’espérance de la résurrection. Et par conséquent fêter la vie qui guérit et triomphe de la mort. Une vie nouvelle que nous apporte Jésus et à laquelle nous avons accès en plaçant en lui notre confiance et notre foi.

La scène de l’évangile peut apparaître surréaliste et improbable. La réputation de Jésus est sulfureuse. Il est un guérisseur reconnu auprès du petit peuple, mais il est contesté par les autorités religieuses, tant par ses paroles, interprétées comme des blasphèmes,[2] que pour ses fréquentations douteuses avec des pécheurs publics.[3] A tel point que même les disciples de Jean-Baptiste lui demandent des comptes parce que ses disciples ne pratiquent pas le jeûne.[4]

Et voici pourtant qu’un notable, qui a pignon sur rue, vient lui demander publiquement son aide. Qu’est-ce qui peut bien motiver pareil personnage à ainsi venir à Jésus, au péril de sa propre réputation ? Le bouleversement provoqué par la mort de sa fille, certainement. Mais n’y-a-t-il pas là plus que la douleur ou le désespoir ? L’autre petite scène figurant en inclusion[5] vient le suggérer.

Car voici que surgit par derrière une femme qui veut toucher Jésus. On peut la supposer désespérée, elle aussi. Elle souffre de métrorrhagie depuis douze ans. Ce qui signifie qu’elle est considérée comme impure depuis lors, et donc exclue de tout contact, de toute relation sociale, sexuelle ou intime.[6] Pour les autres, elle est comme morte, stérile. Le simple fait de vouloir effleurer Jésus en touchant la frange[7] de son vêtement est pour elle la transgression d’un interdit. Elle a l’intuition que celui-ci peut la sauver. Sauver est plus que guérir, le salut apporte une vie nouvelle. Et c’est effectivement ce qui arrive puisque la femme est rétablie dans sa féminité, elle peut réintégrer la société des vivants. Désormais elle pourra enfanter, être porteuse de vie. Elle renaît à une vie nouvelle.

La clef de ce changement radical est la foi. «Confiance, ma fille ! Ta foi t’a sauvé», dit Jésus. La foi qui sauve n’est pas une adhésion théorique ou intellectuelle à une doctrine, un dogme. Mais une foi vécue dans l’expérience d’une relation avec quelqu’un. Une confiance placée en Dieu sur qui on peut compter, parce qu’on sait qu’il vous soutiendra. Une foi donnée à Jésus à qui on s’abandonne. La foi est de l’ordre du lâcher-prise, de la gratuité. Une foi qui permet à cette femme de dépasser ses peurs et les interdits de la société pour toucher celui qui la sauve, et qui se laisse toucher par elle.

De la foi, il en faut aussi beaucoup à ce notable pour s’adresser à Jésus. Pour dépasser ses réticences, son amour-propre et les qu’en-dira-t-on. Une foi qui le pousse à reconnaître la divinité de celui devant qui il se prosterne – on ne se prosterne que devant Dieu. Cette foi vient toucher Jésus qui l’accompagne dans sa maison. Pour affronter le bruit et les moqueries des incrédules.

La jeune fille n’est pas morte, elle dort, dit Jésus. Il la réveille en la touchant de la main et elle se leva. Les mots utilisés par Jésus sont forts, ces sont ceux utilisés pour dire la résurrection. Bien plus qu’une guérison, c’est d’une résurrection des morts qu’il s’agit ici. La vie triomphe en celle qui se lève, comme elle a vaincu la mort en celui qui s’est levé du tombeau.

Deux femmes, deux résurrections. Une jeune fille et une femme plus âgée rendues à la vie par la foi. A nous aussi, Jésus offre la vie, il nous sauve, nous réveille, nous fait nous lever. Il nous délivre de toutes nos morts, de nos habitudes mortifères. Le Christ ne nous propose rien de moins que de ressusciter avec lui. Pourvu que nous surmontions nos peurs et nos défiances pour placer nos existences dans une relation de confiance en lui. Aurons-nous assez de foi pour oser cela ?


[1] En Ardenne, le lundi de la fête patronale est traditionnellement dédié à la mémoire des défunts.

[2] Jésus remet les péchés, ce qui est une prérogative divine et donc considéré comme un blasphème (Mt 9,1-8).

[3] Jésus fréquente les collecteurs d’impôts et les pécheurs, ce qui lui est reproché par les pharisiens (Mt 9,9-13).

[4] Question sur le jeûne (Mt 9,14-15).

[5] L’inclusion est un procédé littéraire très usité dans les Ecritures. Il consiste à intercaler un récit secondaire dans un récit principal pour venir éclairer celui-ci par des explicitations. La teneur du récit inséré vient alors rejaillir sur le récit principal pour lui donner une clé de lecture.

[6] Quand une femme est atteinte d’un écoulement de sang pendant plusieurs jours en dehors de sa période d’indisposition, son impureté dure autant que dure cet écoulement. Quiconque la touche se rend impur (Lv 16,25.27).

[7] Les Juifs pieux portaient une frange plus ou moins longue à leur vêtement. Elle était munie d’un fil violet, symbole du ciel, et devait rappeler les commandements de Dieu, d’où la vénération dont elle était entourée.

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